mardi 27 octobre 2020

SHINE (mutation génétique DLG4): On a trouvé l’oeuf!

Tout un titre! Et tellement de détails à partager pour l’expliquer…

Je vais tenter d’être brève et de me concentrer sur le plus important.

D’abord, ça fait presque 5 ans que je n’ai pas écrit, donc forcément, il s’est passé des choses.

Ensuite, parmi ces choses, nous avons eu un diagnostic génétique (qui nous a amenés à un groupe de parents d’individus avec la même mutation) et ça a tout changé.

Enfin, je viens de relire mon dernier article, qui date du 18 janvier 2016,  et j’ai réalisé qu’en presque 5 ans, tout a changé, mais rien n’a changé, sauf qu’on a trouvé l’oeuf!


Dans “l’oeuf ou la poule”, je parlais d’autisme vs déficience intellectuelle, de diagnostic primaire vs secondaire, de corrélation vs causalité, et des répercussions de tout ça sur l’accès aux services et sur la perception que ça nous donne de Cédric et de son fonctionnement.

Grâce à un test génétique, d’après ce que le généticien nous a dit et ce qu’on en comprend, la mutation génétique de Cédric est la cause et l’explication de tous ses diagnostics: autisme, déficience intellectuelle, épilepsie (et le reste). Et donc scientifiquement parlant, c’est en effet l’oeuf et philosophiquement parlant, ça a aussi fait toute une différence dans notre compréhension et notre perception!


Cédric a une mutation génétique de novo (ce qui veut dire qu’elle n’est pas héréditaire) sur le gène DLG4 (sur le chromosome 17).

Dans son cas, la mutation est de type “indel” ou mutation décalante ou par décalage de cadre (beaucoup de termes, différents en France et au Québec, mais qui semblent tous traduire le terme anglais “frameshift”).

Le gène DLG4 est responsable de la production de la protéine PSD95. Le résultat de la mutation est que Cédric produit moitié moins de cette protéine. Et la PSD95 est une protéine d’échafaude, donc très centrale au fonctionnement du cerveau et qui influence la production de 60 à 80 autres protéines. Donc les conséquences sont importantes.


Le fait qu’une cause claire explique tout ne change rien en soi, et certains diraient que la cause importe peu, mais pour nous c’est rassurant, ça nous aide à mieux comprendre le pourquoi et le comment.

Malheureusement, il n’y a qu’une quarantaine de cas diagnostiqués au monde pour l’instant. Heureusement, nous sommes en 2020, et le monde est petit. Nous nous sommes ajoutés à une quinzaine de familles touchées par une mutation DLG4 sur un groupe Facebook et le sentiment est celui d’avoir enfin trouvé notre clan.

Contrairement à notre expérience dans les groupes centrés sur l’autisme, les similitudes entre Cédric et les autres individus “DLG4” sont incroyables. Les autres parents vivent une réalité très proche de la nôtre et on se reconnaît dans leurs commentaires et descriptions. C’est un partage à la fois rassurant et enrichissant.

Étant dans le tout début de la découverte scientifique du syndrome, il est encore en cour de définition par le corps médical. Les différents chercheurs impliqués autour du globe sont en train d’établir le phénotype. Mais avec les informations que nous avons, un groupe de parents a décidé que le terme médical qu’ils utilisent (pour l’instant vague et pas très joli) ne ferait pas l’affaire! Donc nous avons adopté le terme de syndrome “SHINE”, un acronyme (en anglais) qui décrit les symptômes les plus courants chez nos enfants:

S: troubles du Sommeil

H: Hypotonie

I: déficience Intellectuelle

N: désordres Neurologiques

E: Épilepsie


Ils ont créé un site qui décrit le syndrome SHINE et partage les expériences de nos familles ainsi que des articles et de la recherche, et qui nous aidera à faire de la sensibilisation: http://shinesyndrome.org/ Ils ont aussi créé un logo pour le syndrome.

J’aime beaucoup le choix du terme SHINE et leur choix d’inclure des étoiles dans le logo. Par contre, pour moi, pour une raison ou une autre, dans ma perception de qui est Cédric, l’aspect génétique de la chose est crucial. J’aurais donc aimé que le logo inclut un aspect génétique et étant un peu rebelle sur les bords, j’ai décidé d’en faire un version à moi (entre autres pour mon blog). J’ai donc gardé plusieurs aspects (titre, étoiles et couleurs principales) et j’ai rajouté une chaîne stylisée d’ADN (que j’ai dessinée moi-même), et comme j’adore les arcs-en-ciel… Donc voici ma version du logo (qu’on retrouve aussi dans la nouvelle image en haut du blog):

Il y aurait encore beaucoup à dire: ce que cela peut signifier pour des pistes de traitement, ce que ça indique quant à l’autisme, ce que ça a comme répercussions sur les services, les décisions que ça nous a amené à prendre, etc.

Mais le principal est là: le sentiment qu’on a trouvé l’oeuf!

lundi 18 janvier 2016

L'oeuf ou la poule

Bonne année 2016!



En regardant mon article précédent, je réalise que j'ai sauté un trimestre complet.
Petit récapitulatif du dernier trimestre de 2015:
- transition de l'IBI à l'école qui s'est bien passé grâce à une équipe formidable (à l'IBI comme à l'école),

- Action de Grâces tranquille et Halloween sympa, déguisés en ninjas,
- vacances reposantes au soleil pour les parents,
- chute dans des escaliers pour moi, le jour de l'arrivée de Mani, notre nouveau chien de service,
- et vacances en Floride pour Noël, avec beaucoup de soleil, de journées aux parcs, et notre première croisière Disney.

Mais passons à 2016!
Notre année, en ce qui concerne le parcours de Cédric, a commencé par les résultats d'une consultation avec une équipe d'experts. Ils ont observés Cédric en octobre pour nous conseiller quant à certains de ses comportements les plus extrêmes et difficiles à comprendre et gérer.

Ils nous ont donnés des conseils variés mais surtout une conclusion de fond qui nous donne une meilleure idée de qui est Cédric et comment approcher son développement, mais m'amène aussi à la questions suivante: l'oeuf ou la poule?

Je m'exlique. Cédric a depuis l'âge de 4 ans un diagnostic d'autisme, et depuis un an, un diagnostique de déficience intellectuelle. Comme mon article précédent le mentionne, il a un âge chronologique de 8 ans, mais un âge développemental de 1 à 2 ans.
Le psychologue de l'équipe a conclu que l'approche du développement, des capacités et de l'apprentissage de Cédric devrait prendre en compte cette déficience plus encore que l'autisme. Établir pour Cédric des buts et des attentes typiques pour les enfants sur le spectre ne serait pas réaliste, pas juste pour lui, et amènerait à déceptions et échecs. Il faut d'abord considérer son âge développemental et ses capacités de développement.

Mais le système de services en place en Ontario considère l'autisme comme son diagnostic primaire. Il accède donc aux services d'autisme, avec des spécialistes de l'autisme. Et comme il obtient déjà des services pour ce diagnostic, il ne peut pas accéder aux services équivalents de l'agence spécialisée dans les déficiences intellectuelle. Ce fonctionnement tente d'éviter les dédoublements de services, en partie pour limiter les coûts et assurer que tous les enfants obtiennent des services sous des délais raisonnables.

Et il est vrai que d'après les études et les théories les plus récentes que Dave a lu, il semble que l'autisme soit génétique, et que ce soit l'autisme qui cause un fonctionnement différent du cerveau pendant son développement, empêchant les connections typiques de se faire et dans certains cas sévères, causant un délai ou une déficience intellectuelle.
On pose souvent la question de l'oeuf ou la poule, et la théorie de l'évolution répond assez clairement que c'est l'oeuf qui vient le premier. Donc dans notre cas, le diagnostic d'autisme est effectivement primaire.

Mais quand on pose la question de façon philosophique, c'est plus complexe. Pour l'oeuf ou la poule, on tente en général de soulever une question qui n'a pas de réponse, un cercle sans fin, et chacun peut argumenter sa vision de la chose.
Dans notre cas, si on reste avec l'oeuf, on limite les accès de Cédric aux spécialistes qui seraient peut-être les mieux placer pour comprendre son fonctionnement. La poule, Cédric tel qui est au bout du compte, importe plus que l'oeuf. Cédric est plus affecté et limité par sa déficience intellectuelle que par son autisme.
Et en fait, puisqu'il y a comorbidité des deux diagnostics, peu importe si ce sont deux choses séparées ou si l'une cause l'autre, il devrait avoir accès aux spécialistes des deux.


Si la question n'était que philosophique, ou que purement scientifique, elle importerait peu. Mais pour les raisons d'accès aux services, elle est cruciale. Elle influe même à l'école. D'abord, comme pour nous à la maison, l'équipe qui travaille avec Cédric (enseignantes, aides-enseignants, et conseillers) doit changer la perspéctive et les attentes. De plus, et surtout, l'école a une classe d'autisme, toute nouvelle cette année, juste à temps pour accueillir Cédric. Mais elle a aussi une classe de développement, plus adaptée pour les enfants qui ont des diagnostics divers, et souvent, un délai ou une déficience intellectuelle. Et la question se pose donc de savoir si Cédric devrait être dans la classe d'autisme, ou dans la classe de développement.

La question est récente et rien n'a encore été fait ou changé en réponse. Personnellement, la conclusion du psychologue ne m'étonne pas et confirme ce qu'on ressentait nous-même. C'est une nouvelle étape du deuil progressif qu'est avoir un enfant à besoin spcéciaux. On s'accroche toujours à l'idée d'une rémission, de progrès soudains, d'un médicament ou une procédure magique. Mais c'est aussi une étape vers une meilleure compréhension et acceptation de notre fils tel qu'il est et il est probable que des approches et attentes plus réalistes nous aident à éliminer des frustrations pour lui comme pour nous.

Mais je sens surtout venir beaucoup de questions, de coups de téléphones, de décisions à prendre, et de changements. Je ne peux qu'espérer que ce soit pour le mieux et que ça nous aide à  mieux comprendre et soutenir notre petit bonhomme!

lundi 14 septembre 2015

Il a quel âge?

La question la plus simple qui soit pour un parent! Au début, on compte en mois, puis en années mais avec les quarts et les demis. Et finalement seulement en années. Souvent on est étonnés de la rapidité à laquelle le temps passe et on voudrait qu'ils arrêtent complètement de grandir.

Mais pour moi, au fur et à mesure que Cédric grandit en âge et en taille, c'est de plus en plus dure de répondre à cette question, tout du moins dure pour moi. J'ai du mal à déterminer l'intention derrière la question, comment y répondre et dans quel degré de détail je veux rentrer.
Il y a trois genres de scénarios:
- la personne qui pose la question voie Cédric ou est déjà au courant de ses délais et autisme, donc c'est simple et le but est juste de savoir son âge chronologique.
- la personne le voit et voit qu'il est grand mais qu'il y a quelque chose de différent chez lui. Là je me demande si le but est juste de savoir son âge, ou si c'est de déterminer s'il est juste très grand pour son âge ce qui expliquerait son comportement ou s'il y a quelque chose de différent chez lui et donc d'essayer de demander sans être malpoli. Parfois je donne son âge et laisse la personne tirer ses propres conclusions, parfois je spécifie que Cédric est sur le spectre. Parfois la question sous-entendue ne me dérange pas, parfois elle m'énerve...
- et le dernier scénario et le plus dur et le plus fatiguant pour moi. Je parle avec quelqu'un que je ne connais pas sans que Cédric soit là et la conversation tourne vers le sujet des enfants. La question de l'âge arrive et quand je donne son âge chronologique, les gens ont tendance à parler des avantages de cet âge, des développements et possibilités qui y sont liés. Et je dois faire un choix. Est-ce que je souris et change la conversation vers un autre sujet ou même une autre personne? Ou est-ce que j'explique? Ce scénario est dur pour deux raisons. D'abord c'est triste presque à chaque fois de me ressasser tout ce que les autres enfants de son âge font, aiment, apprennent, etc. que lui ne fait pas. Et ensuite, ça peut être une petite note dans la conversation mais très souvent ça tourne en longue conversation sur l'autisme et des fois je n'ai pas envie de rentrer dans tous les détails et concentrer mon attention sur tout ça. Mais je considère que ça aide à la sensibilisation et je me sens obligée de partager.
Et au cas où vous vous demander quelle est la réponse à cette question, Cédric a 7 ans chronologiquement, mais fonctionne à un niveau de développement autour de 1 à 2 ans selon la dernière évaluation, mais ce n'est pas uniforme. Il fait certaines chose comme un enfant d'un an et d'autres comme un de trois ans.
Donc, comme vous voyez, question simple mais réponse compliquée!


mercredi 27 mai 2015

Cédric l'éponge!

Un des stigmas qui a longtemps été associé à l'autisme est que les enfants sur le spectre n'ont pas d'empathie et ne ressentent pas les sentiments. On a longtemps pensé aux autistes comme étant froids et distants.
Ce préjugé est une des raisons pour lesquelles les médecins nous ont longtemps maintenu que Cédric n'était pas autiste parce qu'il était trop social.Récemment une des mes amis à posté sur Facebook un article présentant la théorie que non seulement les enfants autistes ressentent les sentiments (ce qui est évident chez Cédric) mais qu'ils les ressentent peut-être plus que les personnes neuro-typiques. Selon l'article ce serait même la raison pour laquelle certains refusent le contact et se retirent de la présence des autres: ils ont une telle empathie et ressentent à un tel degré que c'est trop intense.Comme tout dans l'autisme il semblerait, ce trait peut être différent d'une personne à l'autre. Mais personnellement, en lisant l'article, tout ce qui me venait à l'esprit c'est que c'était évident que c'était le cas chez Cédric.

J'appelle Cédric mon éponge! Il capte les émotions des autres autour de lui et bien qu'il n'y réponde pas comme on s'y attend, elles l'affectent énormément. Il ne nous console pas quand on est tristes ou frustrés, mais le climat émotionnel de son environnement dicte son humeur. Il absorbe ce qui l'entoure. Pour Cédric, les humeurs sont contagieuses. Donc si ceux qui l'entourent sont frustrés, stressés, anxieux, ou impatients, Cédric se frustre et se fâche facilement. Si au contraire quiconque s'occupe de lui est calme, heureux et patient, Cédric reste de bonne humeur.

Je suis consciente de cela depuis longtemps. Quand il était bébé, Cédric ne pleurait que s'il avait mal ou si un autre enfant pleurait. Mais j'en ai encore eu la confirmation pendant nos vacances en Floride. J'ai réalisé qu'une des raisons pour lesquelles Cédric est tellement bien à Disney World c'est que tout le monde est bien à Disney World. La foule ne le dérange pas tant que les individus qui la composent sont heureux. A Disney World, tout le monde est heureux, relax, en vacances! Il ne s'est frustré qu'aux moments des repas, quand il avait faim, mais aussi quand ceux qui nous entouraient avait faim et se battaient pour trouver une place dans les restaurants. Aux parcs d'eau, il est absolument relax dans la rivière où tout le monde se laisse flotter et il est heureux dans la petite piscine assez calme où les enfants jouent. Par contre, on a essayé la piscine à vague et bien qu'il ait adoré les vagues et sauter avec son Papa, il s'est fâché et frustré sans raisons apparente pour nous... jusqu'à ce que je réalise que les gens autour de nous étaient nombreux, bruyants et tous surexcités. L'intensité de l'ambiance émotionnelle était trop forte et Cédric ne pouvait pas gérer.

Le problème d'une éponge c'est qu'il faut l'essorer. Quand Cédric va bien, il réagit à nos humeurs mais s'en remet assez vite. Mais quand il est fatigué, malade, affamé, qu'il a trop chaud, etc., il perd sa capacité d'auto-essorage. Il faut changer l'ambiance autour de lui, souvent physiquement le retirer de l'endroit, et laisser l'éponge s'égoutter tout doucement. Au parc d'eau, il a fallu sortir de la piscine, lui donner à manger, faire un tour de rivière, et rejouer une peu dans la petite piscine avant qu'il ne puisse retrouver vraiment sa bonne humeur.

C'est donc un exercice quotidien pour nous de rester aussi calme que possible pour ne pas rentrer dans un cercle vicieux. La bonne et la mauvaise humeur sont contagieuses pour lui, mais pour nous aussi. Les humeurs de Cédric le sont particulièrement parce qu'il est très expressif. Donc si on est fatigués, frustrés ou anxieux, Cédric le ressent et a des crises, ce qui nous rend plus fatigués et frustrés et moins capable de gérer patiemment ses comportements, et comme il nous ressent encore plus fâchés, il fait encore plus de crises, etc., etc.!C'est aussi un facteur important dans nos choix d'activités et de visites et peut-être encore plus dans nos choix de personnes pour faire garder Cédric. On sélectionne autant que possible des personnes positives mais surtout patientes et calmes. Quelqu'un de trop actif et intense, même si c'est de la bonne humeur, fini toujours par être trop pour lui et a des problèmes avec lui (des comportements difficiles, des crises, des pleurs, ...).

Le simple fait d'avoir réalisé tout ça m'aide à analyser les causes de ses crises et à rester plus calme. Mais notre patience à des limites et le reste du quotidien ne s'arrête pas pour nous ménager, donc sport (et yoga pour moi) et vacances aussi souvent que possible pour recharger les batteries!

Et voilà le petit bonhomme tout calme et heureux dans une tasse :D

mardi 27 janvier 2015

Le poing du singe

Il y a quelques temps, dans un podcast qui s'appelle Edumacation, j'ai entendu l'histoire d'un groupe de moine Shaolin qui s'étaient grandement intéressés à un bébé. Le bébé avait lancé la main très vite et enelvé des lunettes du visage de son père. Les moines étaient époustouflés et avaient dit que le bébé avait "le poing du singe", en d'autres mots ce qu'ils considéraient être une habileté innée pour le Kung Fu grâce à laquelle le corps contourne presque entièrement la pensée et passe à l'action de façon instinctive.

Cette histoire m'a vraiment interpellée.

Depuis que Cédric est petit, il est maladroit et à un diagnostique de tonicité musculaire faible et de délai de motricité fine et globale. Même maintenant, à 7 ans, il ne tient pas ses couverts de façon appropriée, il apprend seulement doucement à tourner les choses, sa pince fine est très faible, il peut sauter sur place mais pas en avant.

D'un autre côté, depuis qu'il est tout petit, il est rapide comme l'éclair, il peut lancer la main et attraper ce qu'il veut plus vite que l'ombre de Lucky Luke, il peut bouger chaque partie de son corps indépendamment mais simultanément dans des directions différentes pour empêcher qu'on le contrôle, par exemple quand on essaye de faire une prise de sang ou des rayons x, et il peut nous empêcher de le chatouiller ou de l'embrasser.

Ayant maintenant appris les bases du Jiu Jitsu Gracie, je réalise que ça va même plus loin que ça. La famille Gracie à developpé le Jiu Jitsu brésilien pour l'auto-défense en perfectionnant des techniques qui utilisent la gravité, l'équilibre et les forces et faiblesses du corps pour que même une personne de petite stature puisse se sortir intacte de bagarres ou attaques. Il s'avère que quand Cédric essaie de nous empêcher de le tenir en place ou de le chatouiller, il utilise précisément ces techniques. Il sait qu'il faut placer sa main différemment pour pousser et tirer. Il sait qu'il faut faire nager ses bras pour sortir quand on essaie de le tenir. Il sait qu'il faut faire "la crevette" en sortant les fesses et en utilisant ses jambes pour sortir d'une étreinte. Il sait qu'il faut attraper un doigt faible, plutôt que toute la main ou le bras, et le tirer en arrière pour nous faire lâcher prise que ce soit de lui-même ou de quelque chose qu'il veut. Il sait qu'il faut rentrer le menton pour qu'on ne puisse pas tenir sa tête. Il sait qu'il faut attendre un peu quand il est vraiment coincé et s'éjecter rapidement quand il voit une sortie. Son corps fait tout cela complètement instinctivement.

En écrivant tout ça, je me rend compte que ça donne l'impression qu'on passe notre temps à se battre avec lui où à le restreindre... Ce n'est pas le cas. On a remarqué tout ça dans des situations de tous les jours, en voulant jouer avec lui, en essayant de l'empêcher de prendre ce qu'il ne faut pas, en essayant de faire une prise de sang, etc.
Pendant les vacances de Noël, on a eu l'occasion d'en faire un peu plus l'expérience. On l'a emmené faire des traitement d'oxygène hyperbare pour lesquels il fallait rester 90mn dans un petit contenant. Il a décidé qu'il ne voulait pas y rester et il a fallu le restreindre beaucoup et j'ai réalisé à quel point il est fort, rapide, souple et efficace. Il a même dû y aller une fois avec le technicien parce que j'étais malade. Il s'agit d'un homme grand fort et qui a été entraîné au Jiu Jitsu Gracie dans l'armée. Et même lui en est sorti ébahi de la façon dont Cédric utilisait toutes ces techniques et de son habileté à se sortir de n'importe quoi.

Depuis que j'ai entendu l'histoire du "poing du singe", j'ai donc eu le sentiment que Cédric a cet instinct de défense. Et depuis cela, je me demande pourquoi. A mon avis, il y a trois explications possibles.
1. Il a un talent. Certains sont doués pour la musique, ou le sport, ou la poésie, ou le dessin. Il n'y a pas de raison qu'il ne puisse pas tout simplement être doué pour les arts martiaux.
2. Parce que l'autisme est au moins une partie de l'identité de Cédric, je ne peux pas m'empêcher de voir les choses sous cette lumière. Je me demande si la façon dont son cerveau fonctionne est de quelque façon que ce soit responsable. Peut-être que le fait d'avoir des pensées moins complexes permet une utilisation plus directe de son corps; moins de rationalisation et plus d'instinct animal. Ou le contraire. Certaines personnes et études suggèrent que le cerveau des enfants autistes est surdéveloppé, et on sait que beaucoup d'eux gèrent les inputs sensoriels différemment. Donc peut-être que Cédric a un sens beaucoup plus développé de son corps et comment il bouge.
3. Mon mari à aussi soulevé l'influence possible de l'épigénétique. C'est une théorie selon laquelle même en une génération, ce que les parents ont appris et pratiqué peut passer à leur progéniture. Comme son papa pratique les arts martiaux depuis des années, il est possible que Cédric soit génétiquement prédisposé pour cela.

Tout ce que je sais, c'est que si Cédric développe un jour la capacité d'attention et le désir d'assister à des cours et à apprendre un art martial, il sera un adversaire retaillé!

Un petit PS pour ajouter une page de digiscrap qui met mon ninja en image ;)


mercredi 30 avril 2014

Ce n'est pas le dernier jour

Oui, c'est le dernier jour du mois d'avril...
Bien sûr la journée internationale de l'autisme est seulement le 2 avril et le mois de sensibilisation à l'autisme en Ontario est seulement le mois d'avril.
Mais pour ceux touchés par l'autisme (et dernièrement, nous sommes nombreux) ça ne s'arrête pas à minuit le 30 avril.
Alors demain et toute l'année, continuez à en parler et à sensibiliser les gens, continuez à faire des efforts pour augmenter la tolérance et soyez gentils et patients, et gardez-nous dans vos cœurs et vos prières. Votre support fait toute la différence :D


dimanche 27 avril 2014

Impromptu

Je ne suis pas une personne spontanée. J'aime quand les choses sont planifiées bien à l'avance et soigneusement préparées. Mais récemment, nous avons fait quelque chose qui est vraiment contre-nature pour moi et ça a vraiment payé: on a décidé à 19 heures un soir de rouler jusqu'en Floride et à 10 heures le lendemain matin, on était sur la route!!!

Laissez-moi d'abord vous expliquer ce qui a déclenché cette décision. Cédric a eu un hiver difficile. On lui en demande beaucoup, à la maison comme à l'IBI, et l'hiver a été si rude, si long et si froid! Mars arrivé, Cédric était misérable la plupart du temps, et d'habitude c'est notre petit rayon de soleil, avec seulement des passages courts de colère ou tristesse. Et bien sûr, son malêtre constant nous a affectés. Dave comme moi étions frustrés et fatigués. On se sentait tous enfermés.

Et le mercredi 5 mars, juste avant les vacances de mars, j'ai perdu la tête! Juste un peu, juste pour un court moment; mais j'ai vraiment eu le sentiment de perdre le contrôle. Ça a commencé avec de la colère due à un incident d'entraînement à la propreté (dont je vous passe les détails), puis quelque chose à lâché et j'ai perdu tout sentiment. J'ai commencé à parler lentement, d'une voix monotone, j'avais les yeux écarquillés mais je n'y pouvais rien, et je fonctionnais au ralenti. Tout à coup, j'étais épuisée et le moindre mouvement était difficile.
Dans la pensée, par contre, j'étais complètement lucide et rationnelle. Je me répétais qu'il se passait quelque chose de bizarre et qu'il fallait que je me secoue, mais j'en étais incapable.
Quand Dave est rentré à la maison, quelques heures plus tard, je l'ai prévenu tout de suite. Je ne voulais pas qu'il pense que j'étais fâchée à propos que quelque chose qu'il aurait dit ou fait. Mais je savais que je n'était pas moi-même et qu'il allait remarquer que quelque chose n'allait pas.
On avait parlé/plaisanté pendant le weekend de retourner en Floride pendant le congé de mars. Mais on venait juste d'y aller pendant les vacances de Noël, et on était sur le point de partir au Portugal en avril. Donc, entre les billets d'avion hors de prix, le peu de temps disponible, et le fait que Dave devrait encore manquer une semaine de travail, on avait conclut que ce n'était pas possible,
On avait un rendez-vous médical dans le sud de l'Ontario pendant le congé, mais on pensait simplement y conduire, passer un jour à Toronto et revenir.

Mais ce mercredi soir, en me trouvant dans cet état bizarre, Dave a suggéré qu'on annule le rendez-vous, qu'on parte et qu'on roule jusqu'en Floride. Il faudrait qu'il manque plus d'une semaine de travail et que j'annule une journée de remplacement le lendemain. Il faudrait qu'on transforme notre rendez-vous en une consultation téléphonique. Il faudrait aussi qu'on fasse les valises à la dernière minute, sans aucune préparation. Et surtout, ça voudrait dire 3 jours dans la voiture aller et trois jours retour pour seulement 5 jours là-bas.
Mais ça nous sortirait de la maison, de Timmins, de l'hiver, et de notre routine... Et on avait tous besoin de sortir. En plus si tout allait bien, ça nous permettrait d'arriver le jour des 60 ans du père de Dave et de le surprendre pour son anniversaire.

Normalement, me connaissant, ça m'aurait rendu trop nerveuse et j'aurais dit non. Il y avait trop de complications et pas assez de temps pour se préparer. Mais je n'étais pas moi-même! J'ai d'abord été incapable de décider ou même de m'y intéresser. J'ai dit à Dave de faire ce qu'il voulait et que je suivrait sa décision. Il fallait qu'on aille à la bibliothèque  pour une demi-heure de lecture avec les chiens et la nécessité de sembler normale et d'agir de façon appropriée avec des étrangers m'a permis de me sortir de ma stupeur! Et à ce moment-la j'ai réalisé qu'on avait besoin d'une pause, quelle qu'elle soit, et j'ai dit oui.

C'est extrêmement contre-nature pour moi parce que tellement de choses auraient pu mal se passer et on avait tellement peu de temps pour se préparer.
Je crois vraiment que le traîtement homéopathique que je suis (dont je parlerai plus tard) et le parcours formatif que le diagnostic la forcé a faire m'ont permis de dire oui.
J'étais surtout inquiète à l'idée d'avoir Cédric attaché dans le siège auto trois jours de suite, deux fois. Mais pour ça, l'argument de Dave était "misérable à la maison ou misérable en voiture ne fait pas de différence et au moins on aura 5 jours de pause".

Donc on a mis Cédric au lit et on a commencé à faire le se bagages!
Dave a appelé son frère pour lui demander s'il pouvait se passer de lui au travail pour une semaine de plus. Et ici, je tiens à dire combien j'apprécie le fait que Dave soit son propre patron et que son partenaire soit son frère compréhensif :D
Ensuite, il a appelé sa Mère pour s'assurer qu'on pouvait débarquer chez eux a la dernière minute et arriver à surprendre son Père. J'apprécie aussi infiniment qu'on ait des parents toujours accueillants :D
On a mis nos vêtements d'été dans les valises, on a rempli la glacière (la diète limitée de Cédric rend les repas sur la route difficiles), on a tapé l'adresse de destination dans l'app du téléphone de Dave, et on est simplement partis.

Tout c'est tellement bien passé, je n'en reviens pas encore.
Peu après avoir quitté la maison, Cédric s'est détendu et est devenu calme et heureux. Il a commencé à faire des petits bruits contents, à bavarder à sa façon, et à sourire. Il a regardé par la fenêtre d'un air comblé. Je ne sais pas s'il a compris qu'on partait, s'il a remarqué que ça sortait de notre routine et que ça lui suffisait, ou s'il a senti notre tension ser relâcher, mais il n'avait pas été si heureux et détendu depuis longtemps!
A partir de ce moment là, ça a littéralement été la vie en rose :D
Il a fait un temps magnifique, sur toute la route, 2800km de rien que du soleil. L'application de navigation a fait un travail excellent, on a évité les embouteillages, contourné les grandes villes, et on s'est rendus jusqu'au bout sans aucun pépin. On a trouvé des motels quand Cédric n'était plus à l'aise dans son siège, tous propres et juste au bord de la route pour ne pas perdre de temps (et aux USA, très peu chers!).
On est arrivé à l'heure,prévue, on a surpris Grand-Papa, on est allé à Disney (parcs, parcs d'eau, magasinage), on a profité du soleil.
On a pas vraiment planifié, on est restés flexibles et on a suivi le cours des choses, et de nouveau ça a payé. Quand on planifie trop, tout ce qui se passe mal est plus contrariant et semble plus dramatique. Je me suis énormément amusée, prenant les choses comme elle venaient, et le temps a semblé ralentir par rapport à ce que je ressens d'habitude en vacances. Je n'étais pas constamment en avant de tout, à tenter de préparer l'étape suivante. J'étais dans le moment!
Dave a aussi bien profité des vacances, disant ne pas vouloir partir parce que tout allait si bien qu'il voulait que ça dure encore un peu.
Et je crois que Cédric a aussi beaucoup aimé. D'abord il était ravi de ne pas avoir à porter ses vêtements d'hiver. Et il était si heureux d'être dehors. Malgré un réveil à 3h du matin les deux jours ou on est allés à Disney World, il est resté réveillé et s'est bien amusé. Les manèges, la musique, les couleurs, l'atmosphère... il adore vraiment tout là-bas!
Il a été tout aussi angélique sur le chemin du retour. La route s'est tout aussi bien passée, il a fait aussi beau temps.

Et Cédric se sent tellement mieux depuis! Il est triste et contrarié moins souvent, et ça ne dure pas aussi longtemps.
Bien sûr il y a des conséquences. Il a dormi dans la même chambre que nous pendant 11 jours, donc il refuse maintenant d'aller se coucher tout seul. Mais on est plus reposés et donc capables de prendre chaque défi patiemment et d'y travailler.

Et je pense que j'ai appris trois choses (en écrivant, j'allais dire une unis deux, et j'ai réalisé que c'était trois... donc il se pourrait que ce soit plus et que je ne le réalise pas encore, mais trois c'est déjà pas mal pour une petite virée du congé de mars).
D'abord, j'a appris que j'ai des limites (ce que je savais) et sur quels signes garder un œil pour ne pas faire un dépression nerveuse.
Ensuite, j'ai appris que la routine n'est pas toujours ce qu'il y a de plus important pour Cédric et que de temps en temps il a aussi besoin d'une pause à son quotidien.
Et enfin, et surtout,  j'ai appris que d'obséder à tout planifier n'est ni sain ni productif. J'aime quand même me préparer aux choses et planifier à l'avance dans une certaine mesure. Mais maintenant j'essaie de prendre les choses de façon un peu plus souple qu'avant.

Comme une image vaut mille mots, voici quelques photos de notre voyage: